Louis Mouren, prêtre jésuite


Prédateurs / vendredi, octobre 3rd, 2025

« Quand des victimes enquêtent elles-mêmes pour se réparer »

Louis Mouren, prêtre jésuite, m’a agressé sexuellement, à plusieurs reprises, entre 1967 et 1971.

(témoignage dans Quand le diable a revêtu l’habit, Karthala, 2024)

Dans l’immédiat après-guerre, au moment de l’Épuration, ce jésuite a accompagné quelque 120 condamnés à mort au poteau d’exécution dont les grandes figures du Régime de Vichy et de la Collaboration : Pierre Laval, Joseph Darnand, Fernand de Brinon, Robert Brasillach, Jean Luchaire, etc.

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Il y a 80 ans, jour pour jour, le 3 octobre 1945, Joseph Darnand, ancien secrétaire d’État et ancien chef de la milice du Régime de Vichy, était condamné à la peine de mort. Le lendemain, débutait le procès de Pierre Laval, ancien chef du Gouvernement du Régime de Vichy, qui, à son tour, fut condamné à mort, le 9 octobre. Louis Mouren, prêtre jésuite, aumônier à la prison de Fresnes, les a assisté et accompagné au poteau d’exécution, les 10 et 15 octobre.

Voici, décrit par Lucien Rebatet, écrivain-journaliste collaborationniste, condamné à mort puis gracié, comment ce jésuite assumait son apostolat de la mort et opérait pour tenter d’arracher, et brandir comme un trophée, la conversion des mécréants notoires promis au poteau :

Mais le vrai directeur de nos âmes était le P. Mouren, beau jésuite de quarante ans. Il avait tenté de « ramener » Cousteau par les voies de la raison, apostolat voué à un échec certain sur l’esprit le plus parfaitement voltairien que j’aie rencontré. Pour moi, on lui avait dit que j’étais assez nerveux, ce qui est vrai, et que je n’envisageais pas très sérieusement mon exécution. Il avait donc entrepris de me nourrir des images de la mort. Il entrait chez moi vers neuf heures du soir, m’entretenait longuement de « ses fusillés ». Il en avait eu des centaines, ayant assisté aux hécatombes de Limoges, en août 1944, où l’on flinguait des gamins de seize ans parce que leur grand-père lisait l’Action Française. Il se gardait d’ailleurs de juger ces tueries, mais me décrivait avec la plus grande complaisance les crânes ouverts, les yeux arrachés, les poitrines défoncées où l’on pouvait mettre les deux poings, les corps coupés en deux par les mitraillettes. Quand il me quittait, le sang et la matière cervicale éclaboussaient mes murs, vingt cadavres jonchaient mon plancher. Je trouvais simplement le procédé naïf et un peu choquant. Le P. Mouren a volontiers raconté par la suite que si j’avais dû aller au poteau, il m’aurait eu « in extremis ».

Je lui en ai beaucoup voulu, car c’est un des rares chapitres sur lesquels je sois très pointilleux, et je l’avais reçu fort amicalement dans ma tanière. Mais c’est un peu ma faute. Les jésuites eux-mêmes ne sont pas habitués à rencontrer des mécréants irréductibles qui proclament cependant leur admiration pour Ignace de Loyola.

(Lucien Rebatet, Les Mémoires d’un fasciste, 1941 à 1947 (tome 2), Paris, Jean-Jacques Pauvert, 1976, p. 137)

Après-guerre, chaque 15 octobre, à la chapelle de la Maison des jésuites de la rue de Grenelle, devant des élites vichystes et collaborationnistes, Louis Mouren célébrait une messe à la mémoire de Pierre Laval (Pascale Froment, René Bousquet, Paris, Stock, 1994, p. 553.)